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Liberté, Beauté, Prospérité

Liberté, Beauté, Prospérité

Dans mes écrits, j'ai souvent mis en lumière le lien intrinsèque entre la liberté économique et le développement des nations. Cette liberté, telle une graine plantée dans un sol fertile, engendre un ordre spontané et harmonieux, ce que Frédéric Bastiat, dans sa sagesse, a si justement nommé "les harmonies économiques". Cependant, la portée de la liberté s'étend bien au-delà de la simple sphère économique. Elle est, en effet, la source même du beau, l'essence de l'esthétique qui embellit notre existence.

Cette idée, peut-être surprenante au premier abord, trouve un écho puissant dans les travaux de philosophes tels que Philippe Nemo, qui ont souligné l’intime connexion entre la liberté et la création. En effet, la liberté, en libérant les énergies individuelles, permet à l’homme de s’épanouir, d’innover, et par conséquent, de produire du beau.

 

Commençons par une fable immortelle de Jean de La Fontaine, "Le Loup et le Chien". Cette histoire, en apparence simple, renferme une sagesse profonde sur la nature de la liberté et ses fruits esthétiques.

 

Un Loup n’avait que les os et la peau,

Tant les chiens faisaient bonne garde.

Ce Loup rencontre un Dogue aussi puissant que beau,

Gras, poli, qui s’était fourvoyé par mégarde.

L’attaquer, le mettre en quartiers,

Sire Loup l’eût fait volontiers ;

Mais il fallait livrer bataille,

Et le Mâtin était de taille

À se défendre hardiment.

 

Dans ces premières lignes, La Fontaine dresse un contraste saisissant entre le loup, symbole de la liberté sauvage, et le chien, représentant de la sécurité domestiquée. Le loup, bien que maigre, incarne une certaine noblesse dans sa liberté, tandis que le chien, "gras" et "poli", semble jouir d'une vie confortable, mais au prix de sa liberté.

 

La conversation qui s'ensuit entre les deux protagonistes est révélatrice :

 

Le Loup donc l’aborde humblement,

Entre en propos, et lui fait compliment

Sur son embonpoint, qu’il admire.

« Il ne tiendra qu’à vous beau sire,

D’être aussi gras que moi, lui repartit le Chien.

Quittez les bois, vous ferez bien :

Vos pareils y sont misérables,

Cancres, haires, et pauvres diables,

Dont la condition est de mourir de faim.

Car quoi ? rien d’assuré : point de franche lippée :

Tout à la pointe de l’épée.

Suivez-moi : vous aurez un bien meilleur destin. »

 

Le chien, dans sa proposition, offre au loup une vie de confort et de sécurité. Il peint un tableau séduisant d'abondance et de tranquillité, contrastant avec la vie précaire du loup dans les bois. Cependant, la suite de la fable révèle le prix de cette sécurité :

 

Le Loup reprit : « Que me faudra-t-il faire ?

– Presque rien, dit le Chien, donner la chasse aux gens

Portants bâtons, et mendiants ;

Flatter ceux du logis, à son Maître complaire :

Moyennant quoi votre salaire

Sera force reliefs de toutes les façons :

Os de poulets, os de pigeons,

Sans parler de mainte caresse. »

Le Loup déjà se forge une félicité

Qui le fait pleurer de tendresse.

Chemin faisant, il vit le col du Chien pelé.

« Qu’est-ce là ? lui dit-il. – Rien. – Quoi ? rien ? – Peu de chose.

– Mais encor ? – Le collier dont je suis attaché

De ce que vous voyez est peut-être la cause.

– Attaché ? dit le Loup : vous ne courez donc pas

Où vous voulez ? – Pas toujours ; mais qu’importe ?

– Il importe si bien, que de tous vos repas

Je ne veux en aucune sorte,

Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor. »

Cela dit, maître Loup s’enfuit, et court encor.

 

La révélation du collier du chien est le point culminant de cette fable. Ce symbole de servitude, bien que compensé par le confort matériel, est inacceptable pour le loup. La liberté, même accompagnée de difficultés, est préférée à une vie d'abondance mais de soumission.

 

Cette fable illustre parfaitement le dilemme auquel font face nos sociétés : choisir entre la sécurité offerte par un État providence omniprésent et des politiciens qui nous veulent du bien et la liberté, parfois incertaine mais infiniment plus gratifiante. La Fontaine, avec sa sagesse intemporelle, nous rappelle que la vraie beauté, la vraie richesse, réside dans la liberté de choisir son destin, même si ce chemin est parsemé d'embûches. La liberté, c’est la possibilité de choisir son propre chemin, de réaliser ses aspirations, de créer. C’est cette capacité de création qui distingue l’homme de l’animal et qui lui permet de transformer le monde qui l’entoure.

 

Par ailleurs, il est prouvé que les sociétés qui adoptent des principes de liberté économique, garantissant la propriété privée et le libre-échange, fleurissent économiquement. On peut observer cette règle à travers l'histoire. Prenons l'exemple des bourgs médiévaux. Ces communautés, souvent autonomes, offraient un cadre propice à l'émergence d'initiatives individuelles. Les artisans, les commerçants, les artistes, chacun contribuait à la richesse et à la beauté de la ville. L'absence de réglementation excessive permettait une grande diversité de produits et de services, favorisant ainsi l'épanouissement de l'esprit humain. Les républiques de la Renaissance, telles que Venise et Florence, illustrent comment des régimes basés sur un certain degré de liberté ont permis un essor culturel et économique. L'Italie de cette époque était un terreau fertile pour des artistes comme Michel-Ange et Léonard de Vinci, qui ont produit des chefs-d'œuvre inégalés. En parallèle, le commerce florissant de cette période témoigne de la croissance économique résultant de la liberté d'entreprendre. Prenons l'exemple de l'Angleterre victorienne. Jamais auparavant l'humanité n'avait connu une telle explosion de créativité dans tous les domaines - des châteaux gothiques aux romans de Dickens, en passant par les prouesses de l'ingénierie. Ce n'est pas un hasard : c'est le fruit d'une société imprégnée de liberté économique qui a permis à des milliers d'esprits brillants de s'épanouir. Bien sûr, cette prospérité s'est également traduite par une amélioration spectaculaire du niveau de vie des citoyens.

Frédéric Bastiat, économiste français, a mis en évidence l’existence d’un ordre spontané qui émerge de la liberté économique. Cet ordre, caractérisé par des « harmonies économiques », se manifeste par une coordination spontanée des actions individuelles, conduisant à une optimisation de la satisfaction des besoins de tous. Au-delà de cette efficacité économique, l’ordre spontané est aussi une œuvre d’art, une symphonie où chaque individu joue sa partition. La liberté économique, en permettant à chacun de développer ses talents et ses initiatives, favorise l’émergence d’une société diversifiée et créative. Imaginons un instant une économie comme une vaste toile. Dans un système de liberté, chaque entrepreneur, chaque travailleur, chaque consommateur ajoute sa touche unique à cette œuvre collective. Les couleurs se mélangent, les formes s'entrechoquent et s'harmonisent, créant un tableau vivant et dynamique. C'est la beauté du libre-échange, où les idées, les biens et les services circulent librement, s'enrichissant mutuellement.

 

À l’inverse, les régimes totalitaires ou de contraintes, en supprimant les libertés, étouffent la créativité et produisent la laideur. En effet, la planification centralisée, en cherchant à imposer une vision unique du monde, nie la diversité des talents et des aspirations individuelles. L'URSS en est une illustration tragique. Les plans quinquennaux, conçus pour imposer un rythme de développement artificiel, ont conduit à une standardisation de l'architecture, de l'industrie et de la culture. Les œuvres d'art étaient censurées si elles ne correspondaient pas à l'idéologie officielle. Le résultat fut une société grise et uniformisée, où la beauté était sacrifiée sur l'autel de l'idéologie. L’art de cette période est souvent décrit comme « utilitaire » et « propagandiste », loin des splendeurs de la créativité qui fleurissent dans des environnements libres. La censure et l'étouffement des voix créatives ont produit une esthétique de la souffrance, une misère qui contraste avec le foisonnement artistique des sociétés libres. Le siècle d’or espagnol, avec ses excès, a fini par sombrer dans le déclin économique et artistique, tandis que le goût pour l’ordre absolu de la monarchie espagnole a engendré un environnement stagnant. Le cas de l'Allemagne divisée offre une comparaison saisissante. Alors que l'Allemagne de l'Ouest, bénéficiant d'une économie de marché, connaissait le "miracle économique" d'après-guerre, l'Allemagne de l'Est stagnait sous le joug du communisme. En 1989, lors de la chute du mur de Berlin, le contraste était frappant : d'un côté, une société prospère et dynamique ; de l'autre, une économie en ruine, des villes grises et polluées, symbolisant l'échec esthétique et économique du totalitarisme. En Corée du Sud, par exemple, la transition d’un régime autoritaire vers une démocratie libérale dans les années 1980 a entraîné une explosion de créativité dans des secteurs comme la musique, le cinéma et la technologie. Le pays est désormais reconnu pour son soft power culturel, symbolisé par la vague "K-pop" et le cinéma sud-coréen, dont Parasite a remporté la Palme d'Or en 2019. Ce dynamisme créatif est indissociable de la liberté économique et politique qui règne en Corée du Sud.

 

Le beau produit par la liberté ne se limite pas au domaine artistique. Il s’exprime aussi dans le domaine économique, sous la forme d’une croissance harmonieuse qui améliore le niveau de vie de tous. En effet, la liberté économique, en stimulant l’innovation et l’investissement, permet de créer de nouvelles richesses et de multiplier les opportunités. Aucun pays au monde, doté d’un régime de libertés relativement important, n’est pauvre. Les pays les plus riches et les plus dynamiques sont ceux qui ont su préserver les libertés individuelles et économiques. Selon les chiffres du FMI, les pays qui ont connu une détérioration de leur liberté économique depuis les années 1980, comme le Venezuela, se retrouvent aujourd'hui englués dans la pauvreté, illustrant que les chemins de la contrainte et de l'absence de liberté conduisent inéluctablement à la laideur sociale et économique. Selon l'Index de Liberté Économique publié par la Heritage Foundation, il existe une corrélation directe entre le degré de liberté économique d'un pays et son niveau de prospérité. En 2024, les pays classés comme "libres" ou "majoritairement libres" affichent un PIB par habitant moyen près de sept fois supérieur à celui des pays "réprimés".

 

La liberté n'est pas seulement un concept abstrait ou un idéal politique ; c'est le fondement même d'une société belle et prospère. Comme le loup de La Fontaine, nous devons choisir la liberté. L'histoire nous enseigne que les sociétés les plus libres sont invariablement les plus prospères et les plus créatives. De la Grèce antique à la Silicon Valley moderne, en passant par la Renaissance italienne, les périodes de grande liberté ont toujours coïncidé avec des explosions de créativité, d'innovation et de progrès économique. Car, en fin de compte, la liberté n'est pas seulement le chemin vers la richesse ; elle est la richesse elle-même. Finissons avec une citation de Kant : « la liberté est la condition de toute valeur ».

 

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