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Le contrôle des prix : de la bêtise au front de taureau

https://www.flickr.com/photos/nanagyei/8731314200/

C’est bientôt l’élection présidentielle américaine. Et, naturellement, pleuvent des sophismes pendant la campagne. Je prends, ici, le mot sophisme dans le sens où l’emploie Bentham. “Le sophisme est un argument faux revêtu d’une forme plus ou moins captieuse. Il y entre toujours quelque idée de subtilité, quoiqu’il n’implique pas nécessairement celle de mauvaise foi. Le sophisme est mis en œuvre pour influer sur la persuasion d’autrui et en tirer quelque résultat. L’erreur est l’état d’une personne qui entretient une opinion fausse; et le sophisme est un instrument d’erreur.

 

Dans le cadre de sa campagne, Kamala Harris, vice-présidente des États-Unis et candidate démocrate à l'élection présidentielle, souhaite que le gouvernement fédéral puisse contrôler les prix des denrées alimentaires et des produits d’épicerie. Nous sommes en 2024 et l’on propose le contrôle de prix comme politique économique. Cela me laisse pantois. Comme nous le verrons, la proposition de Kamala Harris est une idée séduisante mais fatale.

 

Examinons minutieusement la proposition de la candidate Harris. Elle suggère que le gouvernement fédéral devrait avoir le pouvoir de fixer les prix des denrées alimentaires, arguant que cela protégerait les consommateurs contre les hausses de prix excessives et garantirait l'accès à une alimentation abordable pour tous. À première vue, cela peut sembler noble et bienveillant. Qui ne voudrait pas d'une nourriture moins chère ? Mais, méfions-nous des bonnes intentions pavant la route de l'enfer économique. Car, derrière cette façade de générosité se cache un monstre bureaucratique prêt à abolir le marché libre et à plonger les américains dans la pénurie. 

 

Pour comprendre pourquoi le contrôle des prix est une idée si néfaste, nous devons d'abord comprendre ce qu'est réellement un prix. Le prix n'est pas un simple chiffre arbitraire fixé par la voracité des entrepreneurs ou la bienveillance des politiciens. Non, le prix coordonne tous les acteurs du marché de façon à ce que l’offre puisse adéquatement servir la demande. Le prix est un langage, un moyen de communication entre producteurs et consommateurs. Prenons un exemple pour mieux comprendre. Transportez-vous un instant dans la peau d'un agriculteur. Cette année, la sécheresse a mis à mal vos champs de blé, réduisant considérablement votre récolte. Face à cette situation, une décision s'impose à vous : augmenter le prix du blé. Ce geste, simple en apparence, déclenche une véritable cascade d'informations sur le marché. En augmentant vos prix, vous envoyez un message clair et précis aux boulangers : “Chers boulangers, les ressources en blé se font rares cette année, il convient donc d'utiliser cette précieuse matière première avec parcimonie”. Les consommateurs, eux, sont incités à reconsidérer leurs habitudes alimentaires. Le pain, désormais plus onéreux, les pousse à explorer d'autres possibilités. Enfin, les autres agriculteurs perçoivent un signal fort à travers le prix : la demande en blé est élevée, une opportunité s'offre à eux d'augmenter leurs propres cultures pour l'année suivante.

 

C'est ainsi que fonctionne le marché, un système complexe où les prix jouent le rôle de messagers, transmettant des informations vitales sur l'offre et la demande. Mais que se passe-t-il lorsqu’un Chef d’ État, dans sa grande sagesse, décide d'intervenir en fixant un prix maximum pour le blé ? Ce mécanisme subtil et efficace est alors brutalement interrompu. Le signal d'alerte lancé par le marché à travers le prix est étouffé. Les consommateurs, ignorant la pénurie imminente, poursuivent leurs achats sans modération. Les autres agriculteurs, ne percevant plus le besoin accru en blé, ne sont pas incités à investir dans de nouvelles cultures. Quant à vous, l'agriculteur à l'origine de l'augmentation des prix, vous risquez de vendre à perte, découragé à l'idée de poursuivre vos efforts les années suivantes. En résumé, en fixant un prix maximum, l'État muselle le marché, empêchant les acteurs économiques de s'adapter aux réalités du terrain. Les conséquences sont nombreuses et néfastes : pénuries, gaspillage, désincitation à produire... Finalement, c'est l'ensemble de la société qui en pâtit. “En économie politique, il y a beaucoup à apprendre et peu à faire” disait l’économiste Jeremy Bentham. Le prix, c’est un langage et non un décret ! Des hommes comme Ludwig von Mises, Carl Menger et Murray Rothbard ont passé leur vie à mettre en garde contre les dangers de l'intervention gouvernementale dans les prix. Ils nous ont enseigné que l'économie n'est pas une machine que l'on peut régler à volonté, même avec les meilleures intentions du monde, mais un organisme complexe composé de millions d'individus prenant des décisions basées sur leurs connaissances et leurs préférences uniques. Aucun bureaucrate, aussi bien intentionné soit-il, ne peut posséder toutes les informations nécessaires pour prendre de meilleures décisions que le marché libre.

 

Le lecteur étatiste pourrait s’écrier : Diantre, pourquoi accorder du crédit aux économistes suscités et à leurs théories ? N'est-ce pas là une simple affaire d'opinions ? Je lui répondrai : Loin de là ! L'histoire, cet implacable juge, nous offre une pléthore d'exemples concrets qui viennent corroborer les mises en garde des économistes. Cinq cas emblématiques suffiront à illustrer les conséquences désastreuses du contrôle des prix. D’abord, Rome. Retournons dans la Rome antique, sous le règne de l'empereur Dioclétien. Face à une inflation galopante, l'édit sur les prix maximums fut promulgué, fixant arbitrairement les coûts de milliers de biens et services. Les conséquences furent désastreuses : les marchands, incapables de réaliser des profits, retirèrent leurs produits du marché. Les pénuries se multiplièrent, le marché noir prospéra et l'économie romaine, déjà fragilisée, s'effondra irrémédiablement. Cet épisode marque le début de la fin pour l'Empire romain.

Ensuite, la Révolution française. La Révolution française, berceau des idéaux d'égalité et de fraternité, ne fut pas épargnée par les illusions du contrôle des prix. La loi du maximum général, instaurée pour garantir l'accès de tous aux denrées essentielles, entraîna une famine généralisée. Les paysans, découragés par des prix artificiellement bas, cachèrent leurs récoltes, préférant les vendre au marché noir. Les villes furent privées de nourriture et le peuple, au nom duquel la révolution avait été faite, souffrit de la faim.

Le cas du Venezuela. Le Venezuela, sous les régimes de Chávez et Maduro, a mis en œuvre une politique de contrôle des prix à grande échelle. Les résultats sont sans appel : les rayons des supermarchés sont vides, l'inflation a atteint des sommets vertigineux et les Vénézuéliens sont contraints de fuir leur pays pour trouver les produits de première nécessité. Le "socialisme du 21ème siècle" s'est mué en un cauchemar économique.

Autre exemple : New York et la crise du logement perpétuelle. Le contrôle des loyers à New York, mis en place pour rendre le logement plus accessible, a eu des effets pervers. Les propriétaires, incapables d'augmenter les loyers, ont cessé d'investir dans l'entretien de leurs immeubles. La construction de nouveaux logements a été freinée, entraînant une pénurie chronique de logements abordables et de qualité.

Un dernier exemple : L'Allemagne de Weimar et l'hyperinflation. L'Allemagne de Weimar, dans les années 1920, a connu une hyperinflation galopante. Le contrôle des prix, loin de résoudre le problème, l'a aggravé. L'argent perdait tellement de valeur que les gens se précipitaient pour dépenser immédiatement leurs revenus. L'économie s'est effondrée, ouvrant la voie à une instabilité politique qui a conduit à l'avènement du nazisme.

 

Ces cinq exemples historiques, issus de contextes très variés, démontrent de manière irréfutable que le contrôle des prix est une politique économique vouée à l'échec. Il ne fait qu'engendrer des pénuries, de l'inflation, de la corruption et, in fine, une dégradation du niveau de vie de la population. Résumons les conséquences inévitables du contrôle des prix : 

  • Pénuries : Quand les prix sont maintenus artificiellement bas, la demande augmente tandis que l'offre diminue. Résultat ? Des étagères vides.

  • Marché noir : Quand les prix officiels sont trop bas, un marché parallèle émerge inévitablement, souvent contrôlé par des éléments criminels.

  • Baisse de la qualité : Incapables d'augmenter les prix, les producteurs cherchent à réduire leurs coûts, souvent au détriment de la qualité.

  • Découragement de l'innovation : Pourquoi investir dans de nouvelles technologies ou méthodes de production si les profits sont limités par le contrôle des prix ?

  • Mauvaise allocation des ressources : Les prix artificiels empêchent les ressources d'être dirigées là où elles sont le plus nécessaires.

 

Je finis ce billet en lançant un appel à la raison. J'implore la candidate Kamala Harris et tous ceux qui sont tentés par le chant des sirènes du contrôle des prix : apprenez de l'histoire. Ne répétez pas les erreurs du passé. Le contrôle des prix n'est pas une solution.

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