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Économie béninoise : État des lieux

Émile Breton. — « La conflagration » (vers 1900) Musée Soumaya, Mexico, photo cc Benoît Prieur

C’est bientôt la fin de l’année 2023. Le moment est venu de faire un diagnostic de l’économie béninoise. Mais, ce n’est pas chose facile car l’économie est un système incroyablement complexe. Complexe car il y a des millions, des milliards de transactions de toutes sortes qui ont lieu chaque jour dans une économie. Toutefois, on peut catégoriser ces transactions en deux groupes : les transactions marchandes et les transactions non marchandes. 

 

Dans toutes les économies, la production peut être divisée en deux catégories : ce qui est vendu sur le marché et ce qui est affecté par l'Etat. La partie de la production qui est vendue sur le marché est désignée comme la production marchande et celle qui est l'objet d'une affectation d'Etat, représente la production non marchande. Le secteur non marchand intègre les services publics (administrations publiques) qui sont évalués sur la base de leur coût soit, essentiellement, les salaires versés. L'économie marchande, quant à elle, intègre les biens et services marchands. La distinction secteur marchand/secteur non marchand conduit donc à dissocier le PIB marchand du PIB non marchand.

 

Un point sur la méthode pour conduire mon diagnostic de l’économie béninoise. Contrairement à Rousseau qui commence son livre Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes par la phrase “Commençons donc par écarter tous les faits”, j’analyserai, ici, l’économie béninoise au ras des faits. De plus, le diagnostic par une seule question. Je me suis posé une question simple et j’ai pris la peine de tirer toutes les implications de la réponse à cette question. La question est la suivante : Comment évolue le PIB marchand par rapport au PIB non marchand du Bénin ? 

 

La réponse est donnée par le graphique suivant :

 

 

Le graphique montre qu’à partir de 2015, la ligne bleue monte plus vite que la ligne verte. Le constat est donc sans appel : au Bénin, le secteur non marchand croît beaucoup plus vite que le secteur marchand. En clair,  l’entrepreneur béninois doit payer de plus en plus cher le « siège social Bénin ». S’il est vrai que les ressources financières du secteur non marchand proviennent directement (via les taxes) ou indirectement (via la dette qui n’est que des taxes futures) du secteur marchand alors, la pression fiscale étant restée relativement stable (autour de 15% du PIB), la dette publique va exploser à la hausse. Raisonnement parfaitement logique. 


Que le lecteur veuille bien considérer le graphique qui suit : 

 

 

Sans surprise, le graphique nous montre que la dette publique extérieure du Bénin est passée de 41,6% du PIB en 2015 à 52,8% du PIB en 2022. Au troisième trimestre de l’année 2023, le taux d’endettement public est de 54,87%.

Alors, d’aucuns pourraient, à ce moment, s’écrier “La dette n’est pas un problème si elle sert à investir”. Et, c’est vrai. Regardons la qualité de la gestion des investissements publics au Bénin (graphique ci-après).

 

 

Ce graphique provient de la page 25 du Rapport du FMI N° 22/245 sur le Bénin. Charles Péguy exhortait à voir ce que l'on voit. Ce que l'on voit est que l’efficience des investissements publics est à la traîne par rapport aux pays comparables. Dit plus clairement, le Bénin a un écart de 20 points de pourcentage avec la moyenne des pays de la sous-région en matière d’efficience des investissements publics. 

 

Si la dette du pays augmente et que les investissements publics ne sont pas efficients alors la balance des paiements courants va se creuser. Raisonnement parfaitement logique. 

 

Soit le graphique suivant : 

 

 

Le solde de la balance des paiements courants du Bénin est passé de -437,3 milliards de FCFA en 2015 à -673,2 milliards de FCFA en 2022. Il y a une phrase du Maréchal de Mac Mahon qui me vient à l’esprit : “Hier nous étions au bord du gouffre. Aujourd’hui, nous avons fait un grand pas en avant”. 

La balance courante du Bénin étant structurellement déficitaire alors le pays vit au-dessus de ses moyens. Donc, le pays risque d’être de plus en plus détenu par l’étranger. Raisonnement parfaitement logique. 

 

Regardons la position extérieure nette du Bénin (graphique ci-après).

 

 

Pour le lecteur non économiste, la position extérieure globale nette (PEG) d’un pays est la différence entre les actifs et les passifs extérieurs du pays. Une PEG positive indique que le pays possède plus d'actifs extérieurs que de passifs, tandis qu'une PEG négative indique que le pays possède plus de passifs extérieurs que d'actifs. 
Pour le Bénin, la position extérieure globale nette (PEG) en 2021 était de - 3800 milliards FCFA. Cela veut dire que l’étranger possède plus de choses au Bénin que le Bénin ne possède à l’étranger. Une PEG de plus en plus déficitaire veut dire que le pays est de plus en plus détenu par l’étranger. 


Si le Bénin avait sa monnaie propre, on aurait constaté une baisse vertigineuse de la valeur de la monnaie nationale. 

 

Aux Béninois, je vais reprendre une phrase chère aux socialistes français, “Braves gens, dormez tranquille, l'État veille sur vous". En revanche, je ne dirai rien de l’état au réveil.

 

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